Rachel - Là derrière, elle gronde
Là, derrière, elle gronde, emprisonnée dans l'entrelac de pierres, Ventre bouillonnant, vivant de mille vies mortes nées cachées à l'ombre de tous les saints, mages, sociers, imprécateurs.
L'enfance erre dans les ruelles étroites ; égarée dans le labyrinthe des colombages, impatiente, ignorant ce qui se trame dans les soubassements, à l'intérieur des murs abandonnés, derrière la brique trompeuse,
Elle coule La Save,
Save, sauveté, la mal nommée. Belle endormie, frissonnante au moindre roucoulement, elle rêve à ses débordements. Patience, patience je finirai bien par sortir de mon lit. Je roulerai dans les ruelles. Je tordrai les grilles enrubannées de chèvrefeuille. J'affolerai les hirondelles amplifiant leur cri syncopé. Rien ne m'arrêtera.
Larmes noires du sang noir des tourments de la mère, droite, grandie, impuissante, immobile dans son cadre, ex-voto vivant, ses petits agrippés à sa robe, sauvés des eaux. Elle délivrée de son choix impossible,
Est-ce moi qui l'ai épargnée ou l'humble prière à Saint Majan,
Save, sauveté, je gronde derrière la cathédrale me fécondant de mots, paroles vivantes abandonnées par les femmes. Je les délivre, je lave les douleurs, j'entraîne les secrets et les bonheurs furtifs,
Save, sauveté.